Sauver Olivier Dubois, journaliste otage au Mali… Ph Rochot.

(Photo d’ouverture: Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters Sans Frontières au rassemblement de Paris)

Les manifestations de soutien aux otages en détention ont-elles un impact sur les négociations et sur l’attitude des ravisseurs ? La question est chaque fois posée. Le rassemblement organisé ce 8 juin par Reporters Sans Frontières pour la libération d’Olivier Dubois, à Paris et à Bamako,  n’a pas mobilisé les foules mais la présence d’une bonne trentaine de médias permettra sans doute de ne pas oublier le sort de ce confrère capturé à Gao, au Mali il y a deux mois.

Ce rassemblement se voulait aussi un message d’espoir, lui montrer qu’il n’était pas oublié si d’aventure il pouvait écouter une radio ou trouver par hasard un morceau de journal.

Olivier Dubois était journaliste indépendant ; il travaillait surtout pour le quotidien Libération et l’hebdomadaire Le Point. Il était en poste à Bamako depuis six ans et connaissait bien le pays, les mentalités, la société, les populations. Il possédait les codes, les clés pour communiquer. Il avait le contact avec des personnages susceptibles de l’introduire dans les milieux djihadistes, toujours avec le souci de rencontrer tous les acteurs du conflit.

Le « Groupe de Soutien à l’Islam et aux Musulmans » qui serait à l’origine du rapt d’Olivier Dubois. (DR)

Olivier Dubois est peut-être tombé dans un piège. Pas facile de travailler dans un pays où la France qui entretient près de 5000 soldats n’est pas forcément bienvenue. La simple possession d’un passeport français peut faire de vous un ennemi quels que soient vos écrits, vos reportages.

Or depuis le dernier coup d’Etat qui vient de mettre au pouvoir le colonel Assimi Goïta, le Mali boude la France. Et la force Barkhane envoyée par Paris (à la demande du Mali) ne cesse de piétiner dans les sables du Sahel. Elle a suspendu ses opérations militaires conjointes et met fin à sa coopération avec le Mali dans sa forme actuelle. Des forces spéciales continueront néanmoins à quadriller la région. Ce retrait de Barkhane peut-il jouer en faveur de la libération d’Olivier Dubois ? Il faut le souhaiter.

Mali: la force Barkhane: photo ECPAD.

Reste la diplomatie française. On la dit active sur le sujet, faisant intervenir ses alliés africains du groupe G5 Sahel et ses amis politiques à Bamako. Mais aujourd’hui les pays d’Afrique sont surtout préoccupés par les conséquences des actions violentes menées par les djihadistes contre les populations et beaucoup moins par le sort d’un otage français.

On l’a vu dernièrement au Burkina Faso : 160 morts lors d’un raid de représailles contre les habitants de Solhan, dans le nord-est, qui avaient eu le tort de vouloir assurer la défense de leur village contre les groupes armés.

Mali: région de Hombori et forces françaises en patrouille. Photo ECPAD.

Le contexte a changé depuis la libération de Sophie Pétronin, otage au Mali durant quatre ans et libérée en 2020 : multiplication des groupes djihadistes, décès du président tchadien Idriss Deby qui accueillait la force barkane et restait crédible, influent parmi les chefs d’Etat des pays du Sahel. L’élargissement de plusieurs dizaines de djihadistes et sans doute le versement d’une rançon élevée, qui a permis la libération de Sophie Pétronin, sont des éléments qui ne sont plus d’actualité.

À Bamako, c’est sa compagne, Déborah Al Hawi Al Masi, qui a pris la parole. « Je suis très émue de tous vous voir, a-t-elle déclaré. Il manque énormément à ses enfants. Olivier, tout le monde le sait, aime le Mali. Il est venu, il est tombé en amour du Mali et je pense que quiconque lit son travail se rend compte que c’est un journaliste qui aime profondément le Mali « . Et d’ajouter que Olivier Dubois faisait partie de ceux qui veulent donner la parole à ceux qui ne l’ont pas.

Paris, place de la République: journalistes couvrant le rassemblement en faveur de la libération d’Olivier Dubois. (Ph Rochot)

Les djihadistes sont-ils sensibles aux manifestations de journalistes ? On l’ignore. Ils peuvent aussi en jouer. Ce qui explique sans doute la modestie de ces rassemblements en faveur de l’otage. Pour l’heure il est utile de faire savoir à Olivier Dubois qui aura peut-être quelques échos de ces rassemblements de Paris et de Bamako, qu’il n’est pas oublié. La présence place de la République d’une dizaine d’anciens otages français, était là pour le rappeler.

Philippe Rochot

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